EuroBasket 2022 : Thomas Heurtel, un pilier de l’Équipe de France dont le short et la brouette font partie de l’histoire des Bleus

Le 25 août 2022 à 15:13 par Arsène Gay

Thomas Heurtel 9 août 2021
Source image : FIBA

À neuf jours du début de l’EuroBasket, revue d’effectif obligatoire afin de vous présenter chacun des douze Bleus qui tenteront de monter le 18 septembre sur le toit de l’Europe, neuf ans après Ljubljana. À l’heure de ces lignes on est d’ailleurs plutôt sur treize joueurs, voire quatorze avec le grand Fall qui zone non loin de la ligne, mais pas une seconde à perdre alors on se mouille en causant de ceux qui devraient sans trop de souci voir leur place pour Berlin validée dans les prochains jours. Allez, on se penche aujourd’hui sur le dossier… Thomas Heurtel, notre meneur titulaire qui aimerait bien se relancer après quelques galères en championnat.

  • Nom : Heurtel
  • Prénom : Thomas
  • Age : 33 ans, eh oui on parle bien du doyen des Bleus pour cet Euro
  • Taille : 1m89
  • Poids : 90 kilos
  • Poste : Meneur
  • Surnom : Tom’, en fait on en a aucune foutue idée donc on a pris le surnom le plus basique qui existe pour un Thomas.
  • Sur le CV : Pau-Lacq-Orthez, Strasbourg, Alicante, Baskonia, Istanbul, Barcelone, Lyon-Villeurbanne, Real Madrid et actuellement… sans contrat.
  • Palmarès en EDF : la médaille d’or au Championnat d’Europe 2013, le bronze à la Coupe du Monde 2014 et l’argent aux Jeux olympiques 2021, c’est bon vous êtes calmés ?

Lorsque l’on prend un peu de recul pour observer et décortiquer les quinze ans – déjà – de carrière de Thomas Heurtel, une chose nous saute immédiatement aux yeux : cette alternance assez brutale entre moments de gloire et tristes épisodes. C’est d’ailleurs d’autant plus étonnant lorsque l’on voit à quel point le bonhomme de 33 ans est médiatiquement discret, comme s’il voulait ne pas faire de vague, mais que celles-ci déferlaient sans lui demander son avis. Commençons toutefois avec ce qui nous importe le plus : le basket. Car orange n’est pas seulement la couleur du ballon avec lequel il est né dans les mains, mais également celle de son sang. Thomas Heurtel aime profondément le basket-ball, et lorsque l’on voit ce qu’il est capable de faire sur un terrain, il est évident que cela est réciproque. Après des débuts très prometteurs en Pro A à l’Élan béarnais et la SIG, le meilleur espoir de Pro A en 2009 s’envole dès 2010 pour l’Espagne où il jouera pour Alicante et, l’année suivante, Baskonia (aujourd’hui Vitoria). C’est d’ailleurs chez nos voisins hispaniques que la carrière du garçon va connaître un véritable bond en avant.

Après un exercice 2012-2013 réussi, Heurtel est appelé chez les Bleus et fera partie des tous derniers sélectionnés pour l’Euro 2013. La suite, vous la connaissez. Dans le sillage de cette génération Parker-Diaw, l’Équipe de France va remporter le premier titre international de son histoire. Mais pour Thomas qui ne joue à l’époque que très peu derrière TP, l’aventure ne fait que commencer. En Espagne l’année suivante, il fait encore une fois partie de l’effectif de l’EDF qui ira décrocher la première médaille (bronze) de notre pays en Coupe du Monde. Bon, et le rôle de notre héros du jour dans tout ça ? Il est encore limité à sept pauvres minutes par match ? Oula non, bien au contraire. En l’absence de Tony Parker, Thomas Heurtel va quasiment tourner à 10 points et 4 passes de moyenne en 51/39/83 sur l’ensemble du tournoi. Cet été-là, le Point God, c’est lui. Mais au-delà des statistiques, c’est l’un des plus grands moments de télévision du basket français que nous délivre Heurtel. Car en quarts de finale, devant le public rouge-orange qui rêve de voir son pays triompher à domicile, Thomas va crucifier les Espagnols d’un tir du parking légendaire qui donne 8 points d’avance aux Bleus à 1 minute de la fin. On vous laisse donc deviner pourquoi le gaillard est depuis obligé de se balader avec une brouette. Encore plus historique que le shoot en lui-même, la réaction de David Cozette fait passer l’action à la postérité. Oui, on parle bien du célébrissime “OH THOMAS HEURTEL, DONNE MOI TON SHORT !” Allez on vous la remet, parce que c’est impossible de s’en lasser.

C’est donc ça la nostalgie ? Bon allez, revenons-en à nos moutons car il y a encore beaucoup à dire. Pour ce qui est du jeu en championnat, après quatre saisons au Baskonia, Thomas va faire un passage par l’Efes Istanbul, où il restera trois ans avec un titre de champion de Turquie à la clé. Mais sa brouette restée en Espagne lui manque, et le garçon va donc retourner en Liga ACB, cette fois au FC Barcelone. Avec les Catalans, il sera même élu MVP de la finale de Coupe du Roi, qu’il remporte face au Real Madrid. Plus globalement, sur toute la période 2013-2019, il faut savoir que Heurtel fait preuve d’une régularité impressionnante en tournant chaque année entre 9 et 13 points de moyenne auxquels vous pouvez ajouter 5 à 7 passes tous les soirs. Et puis ce n’est pas comme si le gars balançait du parpaing. On parle d’un mec qui envoie, sur cette même période, quatre saisons à plus de 40% à 3-points dont l’exercice 2016-17 à 46,5%. Le délire. On peut clairement parler du prime du garçon, qui devient le meneur FIBA par excellence. Vision du jeu, Q.I. basket, adresse extérieure… Thomas embrasse les responsabilités qui lui sont confiées. Mais malheureusement, comme nous vous l’avons dit plus tôt, tout n’est pas rose dans cette histoire. Et les emmerdes ne vont pas tarder à commencer pour notre ami.

En 2015, déjà, il n’est pas sélectionné pour l’Euro en raison d’une “préparation très en deçà du niveau attendu“. Chelou, mais bon soit, ça arrive. En 2019, il rate la campagne qui mènera les Bleus à la troisième place lors de la Coupe du Monde en raison d’une blessure. Là c’est juste un gros manque de bol. C’est fin 2020 que la carrière de Thomas va prendre un premier coup. Au retour d’un match contre Istanbul, le club barcelonais refuse de laisser monter Heurtel dans l’avion et décolle sans lui, le laissant comme une me*de à l’aéroport. La raison ? Les dirigeants ont découvert que ce dernier négociait avec le Real Madrid, alors qu’il avait soi-disant prétexté discuter avec Fenerbahçe. Il faut dire qu’à ce moment-là les envies d’ailleurs du garçon se justifient par la réduction de son temps de jeu, lui qui n’est plus aussi performant qu’auparavant. Certes c’est pas cool, qui plus est avec les histoires de rivalité, m’enfin c’est quoi cette attitude de gamin ? À l’époque, Evan Fournier avait d’ailleurs bien critiqué comme il faut cette décision toute pourrie. Forcément, à la suite de cet épisode, Thomas est écarté de l’équipe, et va mettre un mois avant de trouver un accord de rupture de contrat. Pour rebondir et en attendant l’été, il décide de signer à l’ASVEL en février 2021, où il enverra du steak : 14,7 points, 2,8 rebonds et 6,3 passes de moyenne en 51/41/90. Gros bisous aux rageux. Aux Jeux olympiques de Tokyo, il jouera encore un rôle clé dans la formidable campagne de l’Équipe de France, qui ira décrocher la médaille d’argent. Un de ses plus beaux moments en Bleus comme il le dira lui-même plus tard.

“Les Jeux ont été une expérience incroyable. Humainement et en tant que joueur de basket, c’est un truc unique, inoubliable.”

Bon, si vous pensiez que les choses se sont arrangées par la suite, ben pas vraiment. Après avoir finalement signé à Madrid l’été dernier, Heurtel réalise une saison 2021-22 honorable, jusqu’à avril 2022, où il va commettre une très grosse erreur. La veille d’un match d’Euroleague perdu face au Panathinaïkos, ce dernier va réaliser une sortie nocturne très mal vue par le coach Pablo Laso. Les conséquences ? Une mise à pied instantanée qui le privera entraînement et l’écartera définitivement du groupe. Très gros coup dur pour Thomas, qui en parlait d’ailleurs sans détour comme “le pire moment de sa carrière” à l’Équipe il y a quelque temps :

“Quand je repense à cette histoire, ça m’attriste. Un mauvais choix, et j’ai détruit ce que je cherchais à construire avec un grand club comme le Real. Si je pouvais revenir en arrière, je ne commettrais jamais la même erreur […] C’est peut-être une réputation que j’avais plus jeune, qui me poursuit comme un bout de sparadrap. Pourtant avec Ivanovic à Vitoria, aucun problème. Ivkovic et Perasovic à Efes, RAS. Avec Pesic à Barcelone, T.J. Parker à l’ASVEL, tout s’est bien passé… Aujourd’hui, il y a surtout une inquiétude sur l’effet que ces récentes histoires peuvent avoir sur mon image. Je ne veux pas qu’on me voie pour ce que je ne suis pas. Je suis passionné, je veux être le meilleur possible et gagner des titres. Les seules choses qui m’importent sont ma famille et le basket. Je veux revenir et montrer au club, au coach qui me feront confiance, que je saurai me montrer digne de cette confiance, que je suis toujours capable d’évoluer au meilleur niveau.”

Désormais agent-libre, le meneur traîne donc une image légèrement écornée par les quelques histoires dans lesquelles il a récemment pu se retrouver. Il en est d’ailleurs parfaitement conscient, et on ne peut que partager ses possibles inquiétudes quant à l’avenir. Au début du mois d’août, ce dernier a même dû s’expliquer devant les médias quant aux rumeurs, validées par le concerné lui-même, qui l’annonçait au Zenit Saint-Petersbourg entre autres. Des questions auxquelles il a répondu avoir signé l’attestation sur l’honneur demandée à l’ensemble de la délégation, stipulant qu’il ne s’engagerait ni avec des clubs russes ou biélorusses tant que durera le conflit, sous peine d’être rendu inéligible à la sélection en équipe nationale. Retour en Espagne alors ? On n’en sait pas plus pour le moment, car le bonhomme dit être concentré sur l’Euro qui arrive avec les Bleus. Et on ne va pas se mentir, avec l’absence de Nando De Colo, la sérénité et la gestion de l’attaque de Thomas Heurtel seront essentielles à l’Équipe de France dans sa quête du titre européen. Bon ok, faudra juste faire attention aux pertes de balle, qu’on a pu lui reprocher l’année dernière notamment. Loin des galères qu’il a pu connaître en championnat récemment, ce dernier a donc l’occasion de se relancer, lui qui est encore loin de la retraite et dont le niveau de jeu est encore celui d’un top joueur dans une équipe vice-championne olympique. On a simplement une exigence : qu’il ramène sa brouette avec lui en Allemagne.

[📺LIVE] 🏀 Match de préparation
🇫🇷🇮🇹 Thomas Heurtel : “Je me sens bien, j’espère que ça va continuer !” pic.twitter.com/0XPeoAG9O2

— NBAextra (@NBAextra) August 16, 2022

Taulier des Bleus, short le plus connu de l’histoire du basket français, floor general FIBA parfaitement adapté à la compétition qui arrive dans quelques jours…, Thomas Heurtel est l’un des rouages les plus anciens et importants de l’Équipe de France. Qui sait ? Peut-être deviendra-t-il à son tour le meneur titulaire des champions d’Europe. En tout cas, on le souhaite plus que tout.

Source texte : L’Equipe / Pro Ballers / Basket Actu